Je tremblais, c’était imperceptible mais tout mon corps vibrait comme sous l’influence de décharges électriques. J’étais enfin à Poudlard, cette école si grandiose que j’avais vu dans tant de livre, cet endroit merveilleux dont mes frères n’avaient eu de cesse de me parler... Combien de fois avais-je pu rêver de ce jour sans imaginer une seule seconde ce que cela représentait vraiment? Combien de fois avais-je imaginé cette scène, cet endroit? J’étais en terre promise et pourtant j’avais l’atroce sensation qu’une malédiction pesait sur moi. J’avais pourtant mainte fois eu le temps de faire le tour de la question depuis que j’avais reçu la lettre... La procrastination n’était pourtant pas mon genre mais je n’avais pas pu faire face: Il y avait tellement de choses en jeu! Trop de chose pour que je puisse faire comme si de rien n’était, trop pour être pleinement heureuse...
Ma famille, absolument toute ma famille, avait fait ses études dans la maison des Serpentards. Ils en étaient fiers, c’était dans leur sang, leurs gênes... Ajoutez à cela le fait que mon arbre généalogique regorge de partisans de Voldemort et vous comprendrez sûrement pourquoi mon destin était déjà tout tracé... Seulement le monde des moldus s’était infiltré dans mon monde, à petit pas, juste assez pour éveiller en moi une curiosité sans borne et une admiration toute particulière. Comment vivaient-ils sans magie? Que courage! Rose avait prit un risque énorme en acceptant de devenir ma nounou alors qu’elle n’était qu’une ‘Sang-de-bourbe’... J’ignore même comment elle avait pu se faire une place, un vrai coup de chance... Ou du destin? Quoi qu’il en soit elle avait réussit à ouvrir mon esprit à autre chose, brisant avec une aisance incroyable des bases pourtant solides...
On m’avait toujours présenté ces gens comme des monstres méritant à peine de vivre... Pourquoi? Je n’en sais rien et mon esprit avait toujours eu du mal à se faire à cette idée... Peut être que Rose l’avait sentit? Peut être que je n’étais finalement qu’un plan? Le règne de Voldemort avait sûrement affecté sa famille, ses proches... Peut être n’étais-je qu’une étrange revanche? Elle qui semblait si douce, si franche... Je me souviens encore du jour où elle m’a apprit son secret... Ce n’était pas au tout début non... Par erreur alors que je lui avais bêtement demandé à quoi lui servait la petite machine dans laquelle il lui arrivait de parler en cachette... Jusqu’à ce jour j’ignore toujours si mes parents en sont dotés mais j’en doute. Ce fut un choc aussi bien qu’une révélation, un nouveau monde qui s’offrait à moi, un monde trop grand pour que j’en fasse le tour en si peu de temps.
Nos règles avaient changées, je devais garder le secret et en cachette je lisais des romans moldus. Elle me parlait de son enfance à l’école, de tout ce qu’elle avait pu faire avant d’entrer à son tour à Poudlard. J’étais émerveillée, passionnée... Mais jamais au grand jamais mes parents ne devaient l’apprendre... Chose qui malheureusement fut faite contre notre gré et Rose fut bannie de la maison. J’avais joué l’innocence, prétendu ne pas être au courant et ils m’avaient cru. C’est alors l’un de mes frères qui a prit le relai de mon éducation durant cette dernière année qui me séparait de Poudlard. Il venait d’en sortir et ne savait pas encore trop où le destin l’emmènerait... Mes parents de leur côté ne se souciaient guère de notre avenir, trop occupés par leur travail : Mon père au ministère et ma mère à St Mangouste... Comment en étions nous arrivé là aussi rapidement?
Peut être que nous n’avions jamais été une famille très unie mais depuis que le plus grand de mes frères était entré à Poudlard les choses étaient allées en empirant... Ma mère avait reprit son travail, mon père était de plus en plus acide... Peut être que tout cela était en lien avec les affaires du ministère? Peut être était-ce en lien avec les histoires de Voldemort? Je ne connaitrai sûrement jamais la réponse à tout cela mais une chose est sûre: J’avais beaucoup de chance d’avoir trois grands frères aussi gentils avec moi. Pourtant ils me trouvaient déjà différente: toujours plongée dans les livres parlant de magie, toujours à poser des questions idiotes... L’entrée de mon premier frère à Poudlard avait aussi changé beaucoup de choses dans mon esprit et le monde de la magie semblait plus concret à mes yeux. Pourtant il m’avait toujours entouré, toujours plus.
Voilà, il était sur ma tête à présent, ce lourd chapeau, cette épée de Damoclès. Il représentait tout ce dont j’avais toujours rêvé aussi bien que mon nouveau cauchemar... Serpentard était vraisemblablement mon destin tout tracé mais je n’avais plus envie d’y être. Je ne voulais pas être avec ces gens plein de haine, je ne voulais pas être comme mes frères aînés à maudire les moldus et tout ce qui n’était pas un sorcier pur. Je ne comprenais pas leur attitude, je ne comprenais pas leur façon de penser, de vivre... Car je savais que mes frères n’avaient pas été des amours, ils ne l’étaient qu’avec moi et encore... Haïr la différence, soutenir le retour des Mangemorts, en faire partie... Je ne voulais pas entrer dans ce carcan et pourtant je savais ne pas avoir le choix. La loi du sang. Serpentard allait sûrement être ma maison et je ne m’y sentirai pas chez moi, plus jamais...
*Serdaigle, Serdaigle, Serdaigle*
J’avais fermé les yeux et prononcé ce souhait un peu au hasard. Hors de question de choisir Gryffondor, ce serait trop risqué, me retrouver chez l’ennemi de la famille n’était pas une bonne idée... Je voulais un terrain neutre, un endroit où je pourrais être moi sans être une honte totale pour ma famille... Mais le pourrais-je? Chez les Lakes Serpentard était bien plus qu’une maison, c’était une famille, un mode de vie que nous avions suivit sur des générations... Mon père me détestait déjà pour être une fille, je n’étais plus réellement à ça près avec lui mais ma mère... J’étais sa seule fille, sa fierté... Tant d’années à veiller sur moi comme sur la prunelle de ses yeux, tant d’année à m’éduquer pour que je sois fière de suivre leur pas... Quel gâchis! Et je savais très bien que tout n’était pas la faute de Rose, j’étais déjà curieuse et peu concernée par toutes leurs histoires...
Le chapeau hésita, grommelant des choses que je ne pouvais plus entendre: Mon cœur battait trop fort dans mes tempes... Je ne savais pas quel choix était le meilleur, ce qui était certain était que je ne pouvais pas pleinement rendre ma famille fière de moi. Une maison représentait peut être beaucoup pour eux, pour certaines personnes, mais pour moi ce n’était rien qu’une catégorie, de fausse règles à suivre. Où que j’aille, je resterai moi... Mes yeux s’ouvrent sur la figure inquiète de mon frère, je ne vois que lui à la table des Serpentards, son regard vert planté dans le mien comme autant de poignards... Il était le seul de la famille à me comprendre, le seul à ne pas s’intéressait aux mangemorts et à tout ce bazar. Il voulait devenir joueur professionnel de Quidditch, c’est tout ce qui comptait pour lui et du coup moi je pouvais compter sur lui pour un peu de soutien.
Mais il y avait de la peur dans ses yeux, autant que dans les miens. Savait-il? Comprenait-il à quel point je doutais? Nous étions proches, les plus proches de la fratrie, il lisait sûrement en moi comme dans un livre ouvert... Je devais faire mon possible pour maintenir les apparences, faire semblant... Serpentard pouvait être une merveilleuse couverture tout autant que ça pouvait être une abominable torture... Le choipeau ne semblait pas obéir à nos choix ou peut être était-il conscient que le mien n’était pas arrêté? Je fermais une nouvelle fois les yeux, mon esprit vidé par tant de doute. J’étais comme prise au piège, incapable de trouver une issue convenable... Soit je perdais une part de ma liberté soit je perdais ma famille et je n’étais pas prête à me résoudre à cela, à aucune des deux... Je n’avais que dix ans à l’époque mais je pense aujourd’hui avoir fait le bon choix.
S’était finalement exclamé l’artefact qui disparut de ma tête aussitôt sa sentence annoncée. Mon frère fut le premier debout, applaudissant à en perdre alêne. Il était fier de moi, autant que mes parents allaient l’être... Au moins ça. Je ne serais plus cette étrange jeune fille mais un membre du groupe, une vraie Lake... Lorsque je descendis de l’estrade, mon cœur se fit lourd. Je ne voulais pas réellement entrer dans ce groupe, si c’était le cas j’y serais entrée depuis longtemps... Mais au lieu de ça j’avais gardé ma différence, la voyant presque comme un défi. Unique fille de la famille Lake depuis je ne sais combien de génération, peut être étais-je victime d’une étrange malédiction? J’étais fière de ce que j’étais et je ne comptais pas cesser de me battre. Je serai moi-même sous les couleurs verte et argent de ma maison, moi-même sous la coupe du serpent de la famille.
Je ne comptais pas changer le monde, pas plus que je ne comptais changer ma famille; je voulais juste rester moi-même sans déclencher une guerre familiale. En apprendre plus sur les moldus, parler à leurs enfants, apprendre la magie avec ceux qui avaient eu la chance d’entrer dans notre monde. Je ne demandais pas grand-chose, rien de plus qu’une scolarité normale où nous n’étions pas bêtement bloqué dans des cases... Cette attitude pourra sûrement avoir raison de moi mais maintenant j’étais des leurs, j’avais fait ce minime pas vers la rédemption et je ne comptais pas vraiment en faire d’autres... Les bras de mon frère se serrent autour de moi alors qu’il me soulève du sol. Je suis entrée, c’est officiel, et il me glisse à l’oreille qu’il est fier de moi... Sait-il ce que je pense? A-t-il la moindre idée? Là non plus je ne le saurais jamais mais quelle importance?
Je m’installe à cette table qui me semble bien vide et dirige mon regard vers l’estrade où un autre élève à prit ma place... Le garçon du wagon, celui qui m’a aidé à ranger ma valise. Bêtement, je lui lance un sourire, peut être même que mes joues rougissent légèrement... J’ignore tout de lui, tout jusqu’à son nom. Mais il a été gentil avec moi, spontané. Quoi qu’il en soit, cela représente exactement ce que je veux: être normale avec les gens qui qu’ils puissent bien être et quoi qu’ils soient. Et il n’est pas n’importe quel étranger car dans le cœur d’une enfant de dix ans, les choses se passent vite et le sang monte rapidement à la tête... Je l’ignore encore mais ses yeux noisette allaient être le symbole de ma liberté. Un Gryffondor, un coup de foudre de gamine dont l’ampleur dépassait largement tout ce que je pouvais imaginer à cette époque... Le début de ma vie.
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